Petites impressions d’été

Retrouver le Bagad Kemper en répétition, un dimanche matin frisquet et ensommeillé. Rejouer les morceaux que nous avions créés en 2000 et revoir tout d’un coup superposés ceux que nous étions alors et ceux que nous sommes aujourd’hui; sentir dans la différence entre les deux, comme un squelette dans une chair, tout ce que nous avons vécu entretemps, les amours perdus et trouvés, les enfants nés, les maîtres morts, les maturités qui commencent à sonner… Sentir que tout cela prend place dans la musique, boucle une petite boucle obstinée et joyeuse. Vivement vendredi!



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Se promener dans la foule durant le concert de Francis Cabrel aux Vieilles Charrues; saluer en pensée le technicien qui, à la console, nous gratifie d’un son précis, puissant mais lisible, en un mot: musical. Il ne cède pas à la pression qui, dans ce genre d’évènement, pousse les potentiomètres vers le plus afin de tirer une musique relativement douce vers l’agressivité des groupes de rock qui suivent et qui précèdent, agressivité sans laquelle on craint de laisser le festivalier insatisfait. Rien de tout cela: l’ingé-son tient bon, et c’est bien le lourd potentiel de l’équipement qui, sous sa patte, se met au service de la musique; jamais l’inverse. Quelle élégance… Plus tard, quand le hasard fait que l’on rencontre l’homme de l’art en coulisses, se permettre, maladroitement mais sincèrement, de le remercier…



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Commencer le bal berbère-breton, dans le cadre des animations du 14 juillet à Lyon. (Dans un quart d’heure il faudra hélas tout arrêter car la pluie commencera à tomber sur scène, mais pour l’instant nous n’en savons rien.) Voir danser deux femmes de l’association berbère Awal qui nous invite. Toutes deux menues, urbaines et élégantes, toutes deux les cheveux blancs courts, toutes deux le grand foulard multicolore noué, par-dessus leur tenue citadine, autour des hanches et des jambes, elles s’avancent, seules pour l’instant, dans le rond formé par l’assistance. S’attendre à les voir danser – on est là pour ça – , s’attendre à trouver cela beau, et se retrouver pourtant les larmes aux yeux tout à coup tant il y a de fierté, de classe, de joie dans leur danse. Les mouvements sont petits et précis, il y a quelque chose là-dedans à la fois de retenu et de généreux, rien n’est pour la galerie et rien n’est caché non plus. Ce ne sont pas les danseuses du spectacle prévu peu après (et dont hélas je ne verrai rien): elles dansent comme nous dansons, pour elles-même et pour la fête, réunissant tous les pans de leur histoire dans le mouvement de leur corps. Et c’est si beau que si je n’étais pas sur mon perchoir à devoir chanter dans un instant j’en pleurerais pour de bon…